🇨🇲 🇬🇦 🇨🇩 🇹🇩 🇨🇫 🇬🇶 Les chefs d’État de la Cemac s’apprêtent à se retrouver à Yaoundé, l’avenir de la sous-région dépendra de leur capacité à trouver un équilibre entre des réformes urgentes et des mesures adaptées à la réalité sociale. Les décisions prises lors de cette réunion seront déterminantes, non seulement pour les économies nationales, mais aussi pour les millions de citoyens qui attendent désespérément un redressement de la situation.
En effet, les six pays membres de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique Centrale (Cemac) traversent une période de turbulences économiques sans précédent. À l’image du Congo-Brazzaville, confronté à une quasi-cessation de paiement, plusieurs États peinent à remplir leurs obligations financières. Les fonctionnaires accumulent des mois d’arriérés de salaire, traduisant une incapacité chronique à gérer les finances publiques. La Guinée équatoriale, autrefois portée par ses revenus pétroliers, s’enfonce dans une récession durable. Même les économies les plus résilientes, comme le Cameroun et le Gabon, souffrent d’un surendettement inquiétant, amplifié par des déficits budgétaires persistants.
Ce sombre tableau économique est exacerbé par un ralentissement de la croissance régionale. Selon la Banque mondiale, celle-ci est passée de 3,1 % en 2022 à 1,7 % en 2023, une performance bien en deçà des besoins pour lutter contre la pauvreté. Ce recul s’explique par la baisse des activités pétrolières, notamment en Guinée équatoriale, mais aussi par une gestion économique globalement inefficace dans la région.
u cœur des préoccupations des chefs d’État figure la possibilité d’une dévaluation du franc CFA. Cette mesure, bien que souvent présentée comme une solution ultime pour restaurer la compétitivité des exportations, engendrerait des conséquences sociales et économiques désastreuses. Une dévaluation entraînerait immédiatement une flambée des prix des biens importés, réduisant drastiquement le pouvoir d’achat des populations. En particulier, les ménages les plus modestes seraient lourdement affectés, aggravant ainsi les tensions sociales déjà palpables dans plusieurs pays.
Un autre risque majeur réside dans la soutenabilité de la dette publique. Avec des ratios dette/PIB qui dépassent les seuils de convergence fixés par la Cemac 70 % au Gabon et au Congo, les États peinent à trouver des marges de manœuvre pour honorer leurs engagements financiers. Ce surendettement limite la capacité des gouvernements à financer les services publics essentiels, tandis que la pression exercée par les créanciers internationaux, comme les Clubs de Paris et de Londres, accentue le sentiment d’asphyxie économique.
La diminution des réserves de change constitue également une menace préoccupante. Ces réserves, essentielles pour garantir les importations de biens et services, continuent de se réduire. La Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC) prévoit un repli à 4,5 mois d’importations en 2024, contre 4,8 mois en 2023. Cette tendance compromet la stabilité monétaire et alimente les spéculations sur une crise de liquidité imminente.
Les politiques fiscales adoptées par certains gouvernements pour élargir l’assiette fiscale et introduire de nouveaux impôts ajoutent une couche supplémentaire de complexité. Ces mesures, bien qu’orientées vers l’augmentation des recettes publiques, risquent de décourager les investissements privés et de fragiliser davantage le tissu économique local.
Outre les enjeux financiers, la Cemac fait face à des défis structurels profonds. Le chômage atteint des niveaux alarmants, tandis que l’informalité économique limite l’efficacité des politiques publiques. Dans ce contexte, les perspectives de croissance restent incertaines, minées par les fluctuations des prix des matières premières et les coûts d’emprunt en hausse. Les perturbations du commerce mondial, exacerbées par des conflits internes dans des pays comme le Cameroun et la République centrafricaine, freinent également les efforts de stabilisation économique.
De plus, les dépenses publiques, loin d’être contenues, continuent d’augmenter dans plusieurs États. Cela réduit l’espace budgétaire nécessaire pour répondre aux urgences économiques et sociales. À cela s’ajoutent des catastrophes climatiques récurrentes, qui alourdissent les charges budgétaires et compliquent la mise en œuvre des réformes économiques indispensables.
Les attentes des bailleurs de fonds, notamment le Fonds Monétaire International (FMI), jouent un rôle central dans cette crise. Lors de la réunion d’octobre 2024 à Washington, le FMI a insisté sur la nécessité de réformes structurelles ambitieuses. Ces réformes incluent une gestion plus transparente des finances publiques, une diversification économique accrue, et une meilleure gouvernance. Toutefois, ces engagements exigent des sacrifices politiques difficiles à concilier avec la nécessité de maintenir la paix sociale.
La réunion prévue le 16 décembre représente donc un moment crucial pour la sous-région. Les chefs d’État devront proposer des solutions viables pour éviter une répétition de la crise de 2016. Si les décisions à venir ne parviennent pas à stabiliser les économies locales, le spectre de la dévaluation ou d’un effondrement économique global pourrait devenir une réalité.
Pris quelque part
Yves M Noumedem
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